samedi 14 avril 2018

Père Onésime Lacouture - 3-6 - Apparition aux apôtres dans le Cénacle


CINQUIÈME INSTRUCTION
APPARITION AUX APÔTRES DANS LE CÉNACLE.

Pendant qu’ils s’entretenaient ainsi sur le soir de ce même jour, qui était le premier de la semaine, et que les portes du lieu où ils étaient assemblés étaient fermées dans la crainte des Juifs, Jésus vint et, debout au milieu d’eux, il leur dit: «La paix soit avec vous. C’est moi, n’ayez pas peur!».

PLAN
REMARQUE.
LES APÔTRES ONT PEUR.
JÉSUS LEUR PROUVE SA RÉSURRECTION.
JÉSUS LEUR OUVRE L’ESPRIT AUX ECRITURES.
IL INSTITUE LE SACREMENT DE PÉNITENCE.
IL LEUR REPROCHE LEUR INCRÉDULITÉ.
LE CAS DE SAINT THOMAS.
REMARQUES

Comme nous n’avons pas le temps de parler de chaque apparition, nous allons en fusionner quelques-unes pour fournir plus de matière aux considérations. Aux deux disciples, Jésus leur reproche de n’avoir pas cru aux Ecritures qui décrivaient sa passion et sa mort; dans celle-ci, Jésus reproche aux Apôtres de ne pas avoir cru ceux qui l’avaient vu ressuscité. Il veut donc que nous croyions aux Ecritures et aux témoins de sa résurrection. Les Ecritures prophétisent la passion et la mort de Jésus et les témoins montrent l’accomplissement de ces prophéties. Rien donc ne peut être plus certain tout en laissant une certaine liberté à l’assentiment de la foi.

Nous devons surveiller les fondements de notre foi, car toute notre vie dépend de la qualité de notre foi. Si elle est faible, notre vie sera bien fade et vide de surnaturel; si elle est forte, notre vie sera surnaturelle et fructueuse en bonnes œuvres. C’est elle qui nous préserve du péché. «Votre victoire sur le monde viendra de votre foi». Tous ceux donc qui pèchent manquent de foi sûrement; ils vivent ordinairement selon la raison humaine et là, le démon peut tout dans cet ordre naturel.

C’est le plan divin de donner le ciel à ceux qui le préfèrent à tout le monde. Voilà pourquoi Dieu enverra de formidables tentations à ceuxlà, par exemple, une forte passion pour tel plaisir qu’on préférerait à tout l’univers. Or, Dieu le lui défend sous peine de perdre le ciel et d’aller brûler en enfer. C’est alors qu’il faut une foi solide et éclairée pour tout comparer à ces deux alternatives et connaître les bons moyens pour éviter de succomber dans cette tentation;

Demandons donc une foi solide dans la divinité de Jésus, afin de tout faire pour lui plaire et ainsi mériter sa grâce pour ne jamais l’offenser. C’est dans ce but que nous repassons ces apparitions de Jésus ressuscité.

LES APÔTRES ONT PEUR…

Ils avaient barricadé les portes et les fenêtres par crainte des Juifs qui venaient de crucifier leur Maître et ils en voulaient sûrement aussi à ses disciples comme pouvant propager sa doctrine. Dieu permit ces précautions pour fortifier notre foi, car Jésus entre quand même; son corps ressuscité n’est plus soumis aux conditions matérielles de nos corps de la terre.

Arrêtons-nous à cette peur qu’ont les disciples. Elle est bien naturelle et générale chez les hommes de mentalité païenne. Ils sont tellement habitués à juger de tout selon les sens que tout ce qui les dépasse leur fait peur. Ils tiennent si bien à leur moi païen que tout ce qui pourrait lui nuire leur inspire une crainte excessive.

Or, comme c’est le plan divin de détruire en nous ce moi égoïste, il a ordonné sa Providence pour le tuer! Mais tout être a l’instinct de sa préservation. Tout ce qui dépasse les forces de la nature fait peur aux hommes qui s’aiment tant eux-mêmes. Ils craignent de perdre ce en quoi ils ont mis leur bonheur: les créatures.

Ils ont peur de perdre leur réputation: aussi quelle force dans leur respect humain! Que de mensonges pour la garder, la défendre et l’augmenter! Ils ont mis leur cœur dans les biens de ce monde: aussi quelle peur de les perdre! Ils sont capables de tous les crimes pour la garder. Ils tiennent tant aux jouissances sensibles qu’ils peuvent commettre tous les péchés pour se les procurer. Les femmes et les filles suivent la mode aveuglement dans toutes ses folies et ses excentricités par peur des critiques des autres. Que de jeunes font les fanfarons, parlent mal, font mal, négligent leurs devoirs religieux de peur de faire rire d’eux. Toute cette peur se trouve chez les prêtres et les religieux en proportion qu’ils vivent une mentalité païenne. Ils ont peur de prêcher la folie de la croix et le mépris des créatures pour ne pas se faire critiquer par les philosophes. Combien de religieux ont peur d’être tout aux choses de Dieu parce qu’ils feraient rire d’eux par leurs confrères à mentalité païenne! Les filles et les femmes suivent la mode sottement parce qu’elles ont peur de faire rire d’elles par celles qui aiment le monde à la folie.

Ces peurs diminuent en proportion qu’on tue son païen. On n’a plus peur de ce qui peut produire ce résultat; c’est ce qu’on veut: un mort n’a plus peur de rien perdre, il n’existe plus et ne possède rien. Avec ce critère, on peut se faire une idée du nombre de «morts» parmi nos catholiques. Comme ils sont rares dans le clergé, les religieux et les laïques! A tout instant et à toute occasion, leur païen tremble: ils ont peur de tout. Voilà pourquoi il y a si peu de «ressuscités» parmi les catholiques: leur païen est bien vivant puisqu’il a peur de tout ce qui pourrait le faire mourir!

Après la Pentecôte, les Apôtres n’ont plus peur de rien, excepté de déplaire à Dieu. Puisque Dieu remplace notre moi païen, nous n’avons plus peur pour nous-mêmes, mais uniquement de perdre Dieu qui est toute notre vie et notre bonheur. Plus on vit de foi et moins on a peur. Car la foi nous montre uniquement les biens célestes de l’ordre surnaturel que rien au monde ne peut nous faire perdre, si ce n’est le péché. Alors, la peur d’offenser Dieu est la seule qui reste dans la foi.

Ce que nous venons de dire ne s’applique pas à la peur filiale des bons amis de Dieu, qui est un effet de leur amour. Cette peur augmente avec la sainteté et n’est pas du tout pénible; au contraire, elle contribue au bonheur du chrétien, qui voit un Père en Dieu qu’il aime tendrement.

Il y a une autre peur qui est bonne et qu’il faut garder: c’est celle de perdre son âme. Quelque saint qu’on soit, il faut toujours craindre le péché mortel qui nous précipiterait en enfer. Même Saint Paul après avoir été ravi au troisième ciel, a peur d’être réprouvé.

JÉSUS LEUR PROUVE SA RÉSURRECTION

Le souper était fini; ceux qui avaient vu Jésus étaient débordants de joie, mais les autres étaient tristes et absolument incroyants. Voici que les deux disciples d’Emmaüs surviennent et racontent avec un enthousiasme débordant tout ce qui vient de leur arriver. Encore là ceux qui l’ont vu se réjouissent avec les disciples, mais les autres ne bronchent pas dans leur incrédulité.

Tout à coup Jésus se trouve au milieu d’eux sans être passé ni par les portes ni par les fenêtres, barricadées par peur des Juifs. Il leur donne son salut ordinaire: «Que la paix soit avec vous!»; et il ajoute: «C’est moi, ne craignez point». Mais ils sont saisis d’une grande frayeur croyant voir un esprit. Alors Jésus leur dit: «Pourquoi vous troublez-vous et pourquoi ces pensées s’élèvent-elles dans vos cœurs, regardez mes mains et mes pieds, c’est moi-même; touchez et voyez: un esprit n’a ni chair ni os, comme vous voyez que j’ai…». Après avoir dit cela, il leur montre ses mains et ses pieds. On peut s’imaginer les voir venir à tour de rôle, chacun pour son propre compte, toucher ses mains, ses pieds et la plaie de son côté.

Avec de si bonnes preuves, il nous semble que nous serions tombés à genoux pour l’adorer comme Dieu. Mais, non, ces têtes dures ne croient pas encore, dit Saint Luc, quoique très contents de le voir. Remercions Dieu de cette dureté à croire, c’est une force de plus pour notre propre foi! Jésus les a donc bien convaincus quand ils ont finalement accepté sa résurrection!

Pour mieux les convaincre, Jésus leur demande à manger! Ils lui présentent un morceau de poisson rôti et un rayon de miel. Il en mange devant eux et pour montrer qu’il avait bien mangé comme eux, il leur donna les restes; c’était donc la même nourriture pour eux comme pour lui. Il avait donc réellement mangé et il était sûrement vivant! Ce n’était pas un fantôme, mais un homme vraiment vivant comme les disciples.

Que pouvait-il faire de plus pour leur prouver qu’il était ressuscité? Ils ont tous touché ses plaies. Ils l’ont entendu parler, ils l’ont vu manger la même sorte de nourriture qu’eux. Cela doit nous suffire pour croire en lui. Voilà donc les saintes femmes, Marie-Madeleine, Pierre et maintenant les onze qui se sont convaincus que J.-C. est vraiment ressuscité.

Mais toutes ces preuves matérielles ne suffisent pas pour leur faire voir la portée de la résurrection de Jésus; il leur manque encore l’action du Saint-Esprit dans leur âme pour leur faire voir le plan divin pour nous avoir dans le surnaturel. C’est pourquoi Jésus dit:

JÉSUS LEUR OUVRE L’ESPRIT AUX ÉCRITURES

«C’est là ce que je vous disais, étant encore avec vous, qu’il fallait que tout ce qui est écrit de moi dans la loi de Moïse, dans les Prophètes et dans les Psaumes, s’accomplît». Alors il leur ouvrit l’esprit pour comprendre les Ecritures.

On voit là un bon exemple de l’absolue incapacité de l’esprit humain de saisir le sens surnaturel des Ecritures. Ces disciples avaient été avec lui pendant trois ans; il leur avait dit plusieurs fois qu’il devait être crucifié et qu’il ressusciterait le troisième jour… et ils n’y comprennent rien! Il vient à eux une fois ressuscité, ils le touchent, ils le voient manger la même nourriture qu’eux… et ils ne vont pas plus loin, ils ne comprennent rien aux Ecritures.

Il leur faut donc une intervention spéciale de Dieu pour éclairer leur esprit, afin de comprendre le sens profond, surnaturel et réel des Ecritures. Pourtant, ils étaient dans les meilleures dispositions et conditions pour comprendre. Mais rien n’entre dans leur cœur sans une intervention particulière de Jésus.

Quel dommage que tous nos prêtres ne soient pas convaincus de cette vérité! Combien pensent qu’il leur suffit de lire les Ecritures, de lire des commentaires et d’en avoir une connaissance de tête pour faire du ministère auprès des âmes. Le Saint-Esprit ne se contente pas de ce travail matériel pour ainsi dire. Si les prêtres sont satisfaits de cette connaissance, le Saint-Esprit n’agit pas, ni dans les prêtres ni dans les fidèles. On le voit bien par l’expérience; ces prêtres n’acquièrent pas le goût des Ecritures et ils n’arrivent pas à donner aux fidèles ce qu’ils n’ont pas eux-mêmes. Où sont les prêtres ou les fidèles qui vivent des Ecritures? Ils ne guident pas leur vie d’après elles du tout. Quand est-ce qu’on entend des catholiques appuyer leur conduite sur des textes de l’Ecriture?

Or, le Saint-Esprit a ses exigences pour agir dans nos cœurs et tous les prêtres et les religieux devraient le savoir! Il ne produit pas cette connaissance surnaturelle qui va au cœur pour ceux qui ont des attaches, comme les fumeurs, les priseurs, les passionnés du sport, des vues, de la mode, etc. Or, comme il est bien rare de voir des prêtres sans attaches, il est bien rare aussi d’en voir qui ont la connaissance surnaturelle des Ecritures. Dieu n’attirera pas à lui un chrétien qui trouve déjà son amour dans une créature quelconque, même permise en soi. Voilà pourquoi la masse des prêtres, des religieux et des laïques sont pratiquement comme les disciples de Jésus avant de recevoir le Saint-Esprit; ils sont épais et bouchés sur les choses surnaturelles.

En veut-on la preuve? Quand est-ce que les fidèles ont entendu la doctrine d’une foule de textes qui condamnent nos deux amours naturels avec toutes leurs conséquences dans la vie pratique? Ce sont justement ces textes que Saint Paul appelle: la force de Dieu et la sagesse de Dieu. Il veut dire que Dieu nous aide puissamment quand nous essayons de les pratiquer.

Où sont les fidèles qui ont entendu nos philosophes du clergé expliquer le texte où Saint Paul appelle les choses créées du fumier comparées à l’amour de J.-C.? Où est le prédicateur ou le missionnaire qui a jamais dit aux fidèles que son attache pour le tabac, pour le sport, les vues, etc. était du vrai fumier comparé à l’amour de Dieu?

Où sont les chrétiens qui ont jamais entendu ce texte de Saint Paul qui traite d’illégitimes tous ces chrétiens qui ne veulent pas endurer la persécution ou les épreuves tous les jours de leur vie?

Où sont ces chrétiens qui ont jamais entendu parler de ces textes de Saint Pierre où il dit que c’est notre vocation de souffrir toutes sortes de mauvais traitements injustement comme Jésus? C’est notre vocation, ce n’est donc pas des exceptions quand les autres nous font souffrir. C’est donc normal d’être maltraité comme Jésus l’a été. Où sont les catholiques qui ont jamais entendu cette doctrine?

Où sont les fidèles qui ont jamais entendu dire que Dieu choisit tout ce qui est fou, faible, pauvre pour nous sauver et donc pour nous sanctifier dans la vie ordinaire de chaque jour? Comme tout le monde se révolte quand ces moyens divins nous sont appliqués par la divine Providence! Combien savent que lorsque Dieu voudra sanctifier une personne, il l’abandonnera à des imbéciles, à des ignorants, à des méchants réellement ou apparemment? Comme tout le monde se révolte contre ces moyens bien indiqués par Dieu dans les Ecritures!

C’est donc que les prêtres n’y comprennent rien, puisqu’ils ne prêchent jamais ces textes systématiques. Or, ils sont tous essentiels pour tuer notre païen, pour mépriser les créatures et pour nous sanctifier… et les prêtres n’en savent rien! Voilà une conséquence désastreuse des attaches même aux choses permises en soi, comme de fumer, de suivre les sports, les cinémas, etc, etc. Le Saint-Esprit n’agit pas dans ces «païens» de mentalité qui sont assez épais pour chercher leur bonheur dans les échantillons de Dieu plutôt qu’en Dieu lui-même.

Nos philosophes prêtres sont donc bien de la race des pharisiens d’autrefois qui n’ont pas voulu des textes qui enseignaient la passion, la mort et la résurrection de J.-C. Nos philosophes s’opposent aussi à ces textes qui donneraient Jésus dans le cœur pour nous le faire vivre dans l’amour.

La preuve de ce que nous venons de dire est dans ce fait que tous nos philosophes persécutent n’importe quel prêtre qui prêcherait ces textes si contraires à leur propre vie et à leurs idées païennes des «in se». Comme les pharisiens étaient contre la doctrine de Jésus, ainsi nos prêtres philosophes dans tous les rangs de la société ecclésiastique sont contre tous ces textes qui nous donneraient Jésus dans le cœur.

Que chaque catholique se débarrasse donc de toutes ses attaches pour mériter cette action du Saint-Esprit qui lui ouvrirait l’esprit à la connaissance des Ecritures. Evidemment, les prêtres et les religieux en ont encore un plus grand besoin puisqu’ils doivent les prêcher au monde. Guerre aux attaches partout!

IL INSTITUE LE SACREMENT DE PÉNITENCE

Après avoir mangé, Jésus leur dit de nouveau: «La paix soit avec vous. Comme mon Père m’a envoyé, je vous envoie». Or son Père l’a envoyé dans le monde pour le racheter par le sacrifice de sa vie et la prédication de sa doctrine. Or, pour racheter le monde, il fallait du sang, dit Saint Paul, Jésus a donné tout le sien dans sa passion douloureuse et dans sa mort ignominieuse sur la croix. Voilà donc ce à quoi Jésus envoie ses disciples. Pour racheter le monde, il faut mourir à soi pour ne plus vivre qu’en Dieu et de Dieu. Tout Apôtre doit donc faire la guerre à sa personnalité morale pour que Jésus seul vive en lui. Il doit renoncer à l’amour de toutes les créatures quelque bonnes qu’elles soient en elles-mêmes.

La vie de l’apôtre doit donc ressembler à celle de Jésus: ne pas être de la terre, mais toute du ciel et pour le ciel. Il doit être tout aux choses de Dieu comme Jésus l’était. Il doit enseigner le mépris du monde et l’amour exclusif de Dieu. Jésus n’envoie donc pas ses apôtres, ses prêtres séculiers ou réguliers, exploiter les fidèles le plus possible pour faire une vie de millionnaire! pour courir les amusements, se promener en beau char et faire bonne chère. Ces mercenaires auront un compte formidable à rendre à Dieu!

Ayant dit ces mots, il souffla sur eux et leur dit: «Recevez le Saint-Esprit, les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez et ils seront retenus à ceux à qui vous les retiendrez». C’est là qu’il a donné aux prêtres le pouvoir de pardonner les péchés ou de les retenir. Or, pour qu’ils puissent exercer ce pouvoir, il faut bien que les fidèles leur confessent leurs péchés. Il les constitue juges des consciences; il faut que les fidèles les leur découvrent. Quand un gouvernement nomme un juge, il ne dit pas aux gens d’aller plaider leur cause devant lui; c’est une affaire entendue. C’est la réponse aux hérétiques qui soutiennent que nul texte n’enseigne d’aller dire ses péchés à un prêtre; c’est vrai, mais notre texte rend clairement les prêtres juges des péchés, donc cela suppose que les fidèles vont se confesser à eux.

Pour les grands prédicateurs de la seule miséricorde de Dieu et les prêtres qui ne retiennent jamais les péchés, ils ont la moitié de ce texte contre eux. A quoi bon nous donner le pouvoir de retenir les péchés si on ne refuse jamais l’absolution? Jésus supposait donc qu’il y aurait de bonnes raisons pour refuser l’absolution dans certains cas dont le confesseur doit être juge.

IL LEUR REPROCHE LEUR INCRÉDULITÉ

Saint Marc dit que Jésus se montra aux onze pendant qu’ils étaient à table; il leur reprocha leur incrédulité et la dureté de leur cœur de n’avoir pas cru ceux qui l’avaient vu ressuscité.

Il n’y a aucun mérite à croire parce qu’on a vu; ce n’est plus de la foi, mais de la vision et c’est bien naturel de se fier à sa vue et à ses autres sens. Or, la gloire de Dieu exige que dans le surnaturel nous acceptions tout de Dieu seul. Dans le ciel, notre raison suivra sa lumière divine et notre volonté voudra tout ce que Dieu voudra. Dieu obtient ce résultat en nous obligeant à croire son témoignage sans voir ni toucher. Par exemple, si je crois qu’il est ressuscité sur le témoignage de témoins véridiques, j’agis comme dans le ciel: j’accepte la lumière qui vient de lui et qui m’arrive indirectement, donc sans le secours de mes facultés naturelles, quoique ce soient elles qui reçoivent ce témoignage. Je crois donc sans voir ni comprendre: je me fie à Dieu et c’est là sa gloire et mon mérite.

Evidemment, j’ai le droit de m’assurer que mes témoins sont bien instruits et bien convaincus, ce qui se fait pour nous par le récit des évangélistes prouvé bien authentique et véridique. On peut le voir par le récit de ces apparitions si nombreuses et si bien prouvées et par un bon nombre de témoins qui ne se sont pas montrés crédules du tout, mais bien durs à croire, ce qui est de nature à fortifier notre foi dans leur témoignage.

Quand on lit l’histoire de l’Eglise et qu’on voyage par le monde, on constate combien toutes les générations méritent de reproches du Maître. La plupart des chrétiens n’ont qu’une idée vague de la divinité de J.-C. et ils n’ont jamais pris la peine de scruter les preuves des Ecritures pour s’en convaincre personnellement. Ils l’ont accepté trop vite de tête seulement sans en peser les conséquences pratiques dans la vie. Ils se disent catholiques et vivent exactement comme ceux qui ne le sont pas. Ce manque de foi solide se montre dans la façon de traiter les choses saintes.

Que de prêtres disent la messe comme s’ils n’y croyaient pas! Comme J.-C. dans l’Eucharistie ne les intéresse pas! Leur prédication est surtout spéculative et toute de tête et bien peu pour l’amour du cœur. Justement la doctrine qui nous dépaganiserait et nous diviniserait ne les intéresse pas non plus! Ils ne prêchent pas ou trop peu la folie de la croix et le mépris des choses créées. La raison est qu’ils cultivent des attaches qui empêchent l’action du Saint-Esprit dans leur cœur. Ils n’ont donc pas l’intelligence surnaturelle des vérités de la foi. Alors il est évident que les fidèles vont les suivre en général.

Ceux qui ont une foi solide en la résurrection de N. S. veulent le suivre dans sa vie divine des choses surnaturelles. Or, ils savent que pour cela il faut d’abord le suivre dans sa vie de renoncement et dans son crucifiement en mortifiant leur païen de toutes les façons possibles avec la grâce de Dieu. Saint Paul dit qu’il faut être crucifié au monde et le monde pour nous. Voilà la conséquence de la foi en la résurrection de N. S. Il fait mourir comme lui à soi et au monde pour ressusciter avec lui et comme lui à soi et au monde. Ne prenons pas seulement l’idée abstraite de cette doctrine, mais descendons dans le détail de la vie.

Un mort ne jouit pas du tout quand on lui offre un plaisir terrestre, eh bien! un chrétien doit en refuser le plus possible pour mourir à ce monde et vivre en celui de Dieu.

Être crucifié, c’est refuser une cigarette quand on pourrait et qu’on aimerait à la fumer. C’est refuser un verre de bière, de vin, c’est refuser d’aller au cinéma, d’aller à une joute quelconque, c’est ne pas écouter la radio, ni suivre la télévision, etc., etc. Ce sont ceux enfin qui veulent mourir à eux-mêmes qui espèrent en la résurrection de N. S. Il faut mourir pour ressusciter.

Par conséquent, tous ceux qui ne sont pas mortifiés ne croient pas aux Ecritures qui disent qu’il nous faut mourir à nous-mêmes pour ressusciter avec J.-C.; tous ceux-là méritent le reproche de Jésus qu’il adressait à ses disciples après sa résurrection.

Pauvre peuple, comment aura-t-il jamais ces textes qui enseignent qu’il faut nous mortifier de toutes les façons pour vivre la vie ressuscitée de Jésus? Les prêtres philosophes n’y croient pas et n’en parlent jamais ou trop peu. Cette mort mystique ne se rencontre pas dans la religion abstraite des «in se»; alors ils ne la prêchent jamais au peuple. Eh bien! que chaque chrétien les cherche par lui-même, ces textes, dans la Bible, surtout dans les Evangiles et les Apôtres!

Saint Luc dit que Jésus ajouta ensuite qu’on devait prêcher la pénitence et la rémission des péchés dans toutes les nations. Il venait de dire qu’il fallait que le Christ souffrît comme il a souffert pour entrer dans sa gloire. Or, il n’a pas souffert seulement dans les mots, mais dans sa chair. Les premiers chrétiens faisaient pénitence pour tout de bon, pas par farce comme nos philosophes l’enseignent. Ils ont inventé de si subtiles distinctions qu’ils font sauter toute souffrance dans la pénitence.

Ils distinguent entre pénitence effective et affective, tantôt condamnant l’une, tantôt l’autre et finalement les gens ne savent plus à quoi s’en tenir et ils ne font plus rien. Comme pour le jeûne, ils ont réussi à enlever tout ce qu’il y a de pénible: il suffit de manger un peu moins et l’essence du jeûne est sauvé! Ils sont arrivés à pousser les fidèles à se mortifier seulement en évitant les choses défendues. Ce n’est pas vrai que Jésus et les Apôtres n’ont prêché que cette pénitence de païen! Car Jésus veut que nous tuions nos deux amours naturels; or, ce n’est pas vrai qu’on les détruit en ne se privant que des choses défendues. Il y tant de choses permises qui peuvent les alimenter parfaitement toute notre vie et cela s’enseigne par les prêtres philosophes.

N’écoutons pas les philosophes avec leur pénitence seulement dans les mots ou toute de tête, mais rien dans le corps! Comme toute leur religion qui n’est faite que de mots et de «strictement parlant» et d’abstractions. Jésus et les Apôtres et les saints n’ont pas été martyrs seulement en paroles, mais en fait; suivons-les plutôt que les philosophes du clergé qui sont de vrais païens de mentalité.

LE CAS DE SAINT THOMAS

Quand les disciples lui dirent qu’ils avaient tous vu Jésus ressuscité, Thomas leur dit: «Si je ne vois dans ses mains la marque des clous et si je ne mets mon doigt dans le trou des clous et ma main dans son côté, je ne croirai pas».

Or, huit jours après, les disciples étant encore dans le même lieu, et Thomas avec eux, Jésus vint, les portes étant fermées et debout au milieu d’eux, il leur dit: «La paix soit avec vous». Il dit ensuite à Thomas: «Enfonce ici ton doigt et regarde mes mains; approche ta main et mets-la dans mon côté et ne sois plus incrédule, mais croyant». Thomas répondit et dit: «Mon Seigneur et mon Dieu». Jésus lui dit: «Tu as cru, Thomas, parce que tu as vu; heureux ceux qui qui n’ont point vu et qui ont cru».

Remercions Dieu d’avoir permis cet entêtement chez Thomas; cela prouve qu’ils ont cru quand ils se sont tous bien assurés de la résurrection de J.-C. Ils s’en sont si parfaitement convaincus tous comme on le voit qu’ils l’ont prêché toute leur vie et qu’ils sont morts martyrs pour l’attester de leur sang.

Voilà ceux que Jésus veut que nous croyions pour avoir une foi véritablement surnaturelle avec la grâce de Dieu. Voilà notre mérite si nous croyons fermement la divinité de J.-C., à cause de sa résurrection surtout. Que notre vie montre la solidité de notre foi dans ce monde surnaturel si bien illustré dans la glorieuse vie de J.-C. et durant les quarante jours de ses apparitions à ses disciples. Pratiquons donc les textes qui enseignent la nécessité de mourir à nous-mêmes et au monde! Et que ce soit sans distinction de philosophe qui réduirait tout à des mots ou des idées. Jésus a souffert dans sa chair! Faisons comme lui, souffrons dans notre chair!

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